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L’entresol

Dans mon billet d’accueil, je vous ai dit combien j’aimais écrire. Difficile, dès lors, de ne pas succomber aux petits défis d’écriture que l’on trouve sur la Toile. Comme les devoirs du Goût des Autres, par exemple. C’est déjà le 142ème !

J’ai peur de savoir où mène cet escalier sorti de l’imagination d’Anne-Françoise Couloumy.
L’histoire commencerait par « Dans l’escalier étroit leurs souffles se mêlaient. »
Si en plus elle se terminait sur « À chaque fois tout recommence
Toute musique me saisit », ce serait parfait…

Dans l’escalier étroit leurs souffles se mêlaient. Il les suivait et sentait leur désir monter au fur et à mesure qu’ils descendaient les marches. Il aurait tant voulu être à leur place. Enfin, à sa place à lui, forcément, pas à sa place à elle. En passant à l’entresol, devant la porte de Gertrude Macmuche, il fut content qu’ils soient restés silencieux. Il savait qu’elle n’aurait pas apprécié d’être réveillée et d’être obligée d’imaginer leurs ébats. Mon Dieu, comment avait-il pu entretenir une relation avec cette mégère ? Arrivé en bas, en sortant de l’immeuble, il les dépassa et les appela par leur nom. Ils firent comme s’ils n’avaient rien entendu, mais le suivirent. A intervalles réguliers, il se retournait et constatait qu’ils étaient toujours derrère lui. En fait, il aurait pu ne pas se retourner pour le savoir, tant le plaisir qu’ils avaient d’être ensemble était bruyant. Il se surprit à sourire. Il espérait que ce serait bientôt à son tour de goûter au plaisir de la chair. Oui, il en était certain, elle ne pouvait pas lui refuser cela après ce qu’il avait fait pour elle ce soir.

Il était près de minuit quand il arriva près de la demeure de Olivia. Il n’eut pas à sonner : elle l’attendait, inquiète.

– Alors, comment cela s’est-il passé ?
– Sans problème, un vrai plaisir ! Ils se sont merveilleusement entendus, je n’ai pas eu à intervenir de toute la soirée. Et vous votre concert ?
– Un triomphe, reconnut-elle modestement.
– Cela ne m’étonne pas de vous. Si vous voulez, je suis encore libre demain.
– C’est gentil, mais demain mon père passe la soirée à la maison. Vous comprendrez dès lors que… Mais pour me faire pardonner, puis-je vous offrir un verre de champagne, à l’occasion du succès de mon concert et pour fêter notre rencontre ?
– Volontiers, je trouve ce breuvage particulièrement aphrodisiaque.

Il était sept heures le lendemain matin, quand il rentra chez lui. C’est d’un pas guilleret qu’il s’engagea dans l’étroit escalier, Médor sur ses talons. A l’entresol, il salua Gertrude Macmuche d’une voix joviale. Il ne put réprimer un sourire en s’imaginant sa tête si elle apprenait de quoi il vivait. C’est vrai que son nouveau job démarrait bien. Demain soir, c’était Mirza, la chienne de Cécilia qu’il devait garder. Cécilia était soprano dans l’orchestre où Olivia était premier violon. Elles étaient toutes les deux aussi jolies l’une que l’autre, et pas farouches pour un sou. Il sentit qu’il commençait à apprécier la musique classique. Un poème d’Aragon lui trottait en tête.

A chaque fois tout recommence
Toute musique me saisit.

10 commentaires sur “L’entresol”

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